S’il est entendu que ces 8,1 M€ de capacité d’autofinancement n’ont pas vocation à financer les dépenses de fonctionnement, il n’en demeure pas moins que les sections sont liées entre elles et forment un seul et même budget.
On peut alors, légitimement, se demander si une appréciation plus juste de certains postes et surtout la prise en compte des résultats 2009 lors de l’établissement du BP et le vote des taux, n’auraient pas permis d’épargner aux girondins une hausse des taux d’imposition ménages en 2010 et ainsi une baisse de leur pouvoir d’achat dans une période déjà très difficile.
Pour mémoire, la majorité départementale a augmenté de 3% les taux des trois taxes ménages en mars dernier, soit des recettes supplémentaires pour notre collectivité de 7,8 M€ avec un point de fiscalité à 2,6 M€.
Ce budget supplémentaire est aussi pour nous l’occasion, une nouvelle fois, de demander un effort sur la maitrise des charges de fonctionnement. En effet, on n’observe pas de baisse des charges à caractère général (non salariales). Au mieux, ces dépenses stagnent et augmentent même de 1,2 M€ (+1,2%).
Concernant le RMI/RSA, c’est le principal ajustement de cette section car les dépenses augmentent de 20 M€ par rapport au Budget. Cette augmentation constatée depuis le début 2010 est difficilement expliquée par la Caisse d’Allocations Familiales, gestionnaire du dispositif. La hausse du nombre de bénéficiaires (+8% en janvier dernier) ne peut être qu’une partie de l’explication.
Ce phénomène national est expliqué par l’ADF en ces termes : « » Depuis la mise en œuvre du RSA, les départements gèrent les anciens allocataires du RMI (RSA « socle ») mais aussi les anciens bénéficiaires de l’allocation parent isolé (dit RSA « socle majoré »). Cette dernière catégorie s’avère plus importante que les prévisions (en moyenne 10 % de plus par département). On est passé de 176 000 bénéficiaires de l’API à au moins 189 000 bénéficiaires du RSA socle majoré. On cherche actuellement à expliquer ces chiffres. Quatre premiers facteurs ont été identifiés par la CNAF : la modification réglementaire de la limite d’âge des enfants et autres personnes à charge pour la prestation : recul de 20 ans à 25 ans ( 1000 foyers concernés) ; un changement dans la définition des bases de ressources (3000 foyers supplémentaires) ;
- l’attribution automatique du RSA socle majoré aux personnes qui répondaient aux critères d’éligibilité, certaines personnes dans le passé n’avaient pas fait de demande d’inscription à l’API et étaient restées au RMI (3000 foyers concernés) ;
- l’application de règles de gestion simplifiée (les nouveaux logiciels ont fait réapparaître des allocataires radiés) (3000 foyers supplémentaires). » »
Le rapport Jamet indique, par ailleurs, qu’à l’occasion de la prise en charge du RMI, les départements avaient dénoncé l’opacité avec laquelle ils payaient les appels formulés par la CAF et la MSA. Lors des débats de la loi visant le RSA, un certain nombre de garanties d’échanges d’informations ont été arrêtées.
Hélas, la situation non seulement ne s’est pas améliorée mais elle a empiré.
Il est urgent de normaliser les relations entre les départements et la Caisse d’Allocation Familiale, dans toute la France, afin que la gestion soit possible de part et d’autre des ces flux financiers importants.
Concernant l’APA, le BS ne fait pas ressortir d’évolution notable par rapport au BP. Ce poste de dépenses reste néanmoins une des causes majeures des difficultés financières des départements français.
L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) a été instituée par la loi du 20 juillet 2001 par le gouvernement de Lionel Jospin et la majorité parlementaire de l’époque. Depuis cette date, le nombre de bénéficiaires n’a jamais cessé de croître et le coût n’a jamais cessé d’augmenter. Aujourd’hui, en Gironde, le coût de l’APA est de 120.3 Millions d’€uros (année 2009), le nombre de bénéficiaires est de 28442 (année 2009 – source DPAH). En 2003, le coût de l’APA était de 72.8 Millions d’€, et le nombre de bénéficiaires de 18550 !
La loi de 2001 n’avait ni intégré ni prévu de compensation… Le 1er Ministre d’alors, Lionel Jospin avait même dit à l’occasion de débats au Sénat : « Les Conseils Généraux financeront cette dépense nouvelle avec l’augmentation des droits de mutation ».
Contrairement aux dépenses transférées au département par les lois Raffarin I et II, la loi Guinchard du 20 juillet 2001 a créé l’APA sans qu’aucune règle de compensation ne soit inscrite dans la loi.
Il y a quelques jours, le Premier Ministre, François Fillon a reçu l’Association des Départements de France et a annoncé officiellement l’ouverture dès septembre du chantier de la dépendance avec une réforme complète du financement de l’APA précisant que la loi serait votée avant fin 2010 pour un système opérationnel dès 2011.
Enfin, concernant les autres charges de gestion courante, il faut noter la hausse du poste « foyers occupationnels, CAT et accueil des handicapés » de +4,6 M€. Elle s’explique par la réévaluation des frais d’hébergement des personnes handicapées pour +5,1 M€. On peut se féliciter de l’ouverture de nouvelles places d’accueil de personnes handicapées notamment dans les foyers de Camblanes-et-Meynac et de Braud-et-Saint-Louis. Concernant les recettes de fonctionnement, elles font l’objet de deux ajustements à la hausse:
- Le premier concerne les recettes de l’imposition directe qui sont en hausse de 2,1 M€. Cela s’explique par la sous-estimation (à hauteur de 3,2 M€) lors du BP de la compensation relais de la TP. On peut remarquer, ici encore, que ces 2,1 M€ supplémentaires représentent pratiquement 1 point de taux de fiscalité pour les ménages girondins dont on aurait pu leur épargner la charge dans cette période difficile.
- Le second ajustement et le plus important, porte sur les droits de mutation dont le redémarrage est bien plus rapide que les projections du BP. Ainsi, c’est une recette supplémentaire de 20 M€ qui est proposée au BS, dont quasiment la moitié a déjà été constatée au premier quadrimestre (ce qui couvre en valeur absolue le surcoût lié au RSA).
Concernant la section d’investissement, elle est marquée au niveau des recettes par une légère hausse d’1 M€ qui s’ajoute au 1,2 M€ d’excédent supplémentaire de la section de fonctionnement, au 5,9 M€ issus des résultats 2009 et au 1,9 M€ de reports de cette section.
Cela finance donc à hauteur de 10 M€ une hausse des dépenses d’investissement.
Ce volume est réparti pour 33% sur les subventions d’équipement et pour 67% sur les opérations concernant le patrimoine de la collectivité.
Pour autant, il n’y a pas de remise en cause de la politique de moratoire sur les AP décidée à l’occasion du budget 2010. Seul des assouplissements sont envisagés, notamment pour répondre à des demandes d’aide qui avaient obtenu un avis technique favorable.
En conclusion, chers collègues, ce Budget Supplémentaire ne marque pas de changement réel de politique de la majorité départementale.
Il pointe du doigt des recettes et des dépenses qui fluctuent dans des proportions importantes, dans un environnement de crise internationale majeure : à savoir les dépenses à caractère social (RSA) et les droits de mutations qui sont directement liés au marché de l’immobilier. Ces fluctuations incitent à la vigilance.
Plus que jamais, afin de retrouver des marges de manœuvre budgétaires, notre collectivité doit s’engager dans une démarche d’économie sur les dépenses de fonctionnement à caractère général afin d’augmenter les investissements.
C’est en substance ce que disait Jacques Attali lors de son passage à Bordeaux il y a quelques jours : « Il faut sanctuariser la dépense d’investissement utile ». C’est ce que nous faisons, chers collègues, en participant au financement de la LGV.
Dans une lettre ouverte que chacun de nous a reçue, la Coordination des Associations Vigilance LGV écrit : « Que diriez-vous d’un smicard ayant du mal à nourrir et à loger sa famille s’il décidait, un beau matin, de prendre un crédit sur cinquante ans pour s’acheter une rutilante voiture de sport vantée par la publicité et dont le prix, déjà excessif, peut encore doubler après la signature du contrat de vente ? Vous diriez, à juste titre, que cette personne est totalement irresponsable ! ».
Cela a très bien été dit ce matin, par les différents intervenants. Il ne s’agit pas d’acquérir une voiture de sport, mais un nouveau moteur pour notre économie Girondine. Les retombées économiques de cet investissement partagé généreront de nouvelles recettes pour notre département, notamment de « droits de mutations ». En effet, la réserve foncière du projet Euratlantique qui est de 738 hectares s’étend sur les communes de Bordeaux (386 ha), Bègles (217 ha) et Floirac (135 ha) va être aménagée et générer de très nombreuses constructions, puis transactions, augmentant cette recette, pour notre département, tant en volume qu’en valeur. Je rappelle ici, que dans le cadre de la réforme de la fiscalité, la part « état » des droits de mutation a été transférée aux conseils généraux. A cette recette s’ajoutera la recette que constitue la nouvelle CVAE, la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. Nous restons persuadé que ces recettes nouvelles permettront de rembourser cet investissement.
Comme le dit OL Barenton dans les propos de OL Bareton Confiseur, « les comptables sont comme les phares d’une voiture, ils éclairent la route, mais ils n’en sont pas le pilote ». Gardons nous de juger ce projet d’investissement, sur la base des chiffres d’aujourd’hui.
Et puis nous devons le dire dans cette enceinte, le Conseil Général de la Gironde n’est pas dans la situation d’autres départements. Ce budget supplémentaire nous le montre une fois de plus. En juin, nous avons des recettes et des dépenses plus importantes que celles prévues en mars, mais l’ensemble se solde par un solde positif de +10 M€.
Notre dette reste inférieure à 5 fois notre épargne brute annuelle.
Mes chers collègues, dans la mesure où nous avions voté contre le budget, du moins était-ce notre intention, nous votons contre ce budget supplémentaire. Cette décision s’appuie sur deux arguments :
- Comme nous l’avions signalé au moment du vote du budget, la hausse des impôts des girondins aurait pu, aurait dû, être évitée. Notre comptabilité budgetaire nous le montre aujourd’hui.
- Ce budget supplémentaire ne contient pas les prémices d’une action de fonds sur la diminution des charges à caractère général, dont nous avons pourtant besoin pour augmenter nos marges de gestion, augmenter « l’investissement utile », et nous protéger des recettes et des dépenses qui fluctuent dans cette période de crise. Gageons que le travail engagé par l’ADF et le gouvernement sur le financement de l’APA et sur la normalisation des relations entre les départements et les organismes sociaux aura un impact positif sur ces fluctuations.