Intervention de Xavier Loriaud sur l’usage du MOX à Blaye lors du BP 2012
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Comme pour 19 communes proches du CNPE du Blayais, le Conseil Général de la Gironde a été saisi pour avis par le Préfet de la Gironde sur le dossier relatif à l’introduction du combustible MOX sur les tranches 3 et 4 du Centre Nucléaire de Production d’Electricité (CNPE) du Blayais.
Vous nous proposez de réaffirmer les préoccupations auxquelles nous souscrivons concernant le combustible MOX, telles que :
– Les impacts sur la santé des travailleurs, mais également des riverains ;
– Les impacts sur l’environnement, notamment sur un milieu fragile comme celui de l’estuaire de la Gironde ;
– Le risque d’accident, qui peut être lié à des risques naturels (inondations, évènements climatiques extrêmes…).
En conséquence, vous nous proposez d’émettre un avis réservé sur ce dossier.
Alors, mes chers collègues, je voudrai ici rappeler ce qu’est le MOX ; je serai le plus objectif possible. Mais l’objet de mon propos est d’informer dans une période où la désinformation fait parfois rage.
Le MOX est un combustible recyclé fabriqué à partir de plutonium issu des combustibles usés et d’uranium appauvri. Le terme MOX est l’abréviation de « Mélange d’OXydes » car le combustible MOX contient du dioxyde de plutonium et du dioxyde d’uranium appauvri.
UTILISATION
Le combustible MOX est utilisé depuis 1972 en Allemagne, depuis 1984 en Suisse, depuis 1987 en France, depuis 1995 en Belgique.
Peu de réacteurs dans le monde peuvent utiliser le combustible MOX, et ils l’utilisent en quantité limitée (30%), le reste étant de l’uranium enrichi.
En France, 22 des 58 réacteurs sont techniquement adaptés pour recevoir ce type de combustible : Saint-Laurent (Loir-et-Cher), Gravelines (Nord), Dampierre (Loiret), Tricastin (Vaucluse), Chinon (Indre-et-Loire) et Blaye (Gironde) dont il est question aujourd’hui.
Ces réacteurs produisent environ 7 % de la production électrique nationale. Des demandes d’autorisation d’EDF pour charger d’autres réacteurs sont en cours.
A noter que certaines centrales ont été conçues pour fonctionner entièrement avec du MOX, comme le réacteur pressurisé européen (EPR) à la centrale nucléaire de Flamanville, en France, ou bien la centrale nucléaire de Palo Verde, aux Etats-Unis.
Actuellement, AREVA est le leader mondial en matière de fabrication de combustible MOX.
En 2010, le groupe détenait 95 % des parts de marché. Le MOX est fabriqué en France par l’usine AREVA MELOX, implantée à Marcoule dans le Gard, depuis 1995, à partir des déchets des centrales retraités à La Hague (Manche).
L’utilisation du MOX est, en quelques sortes une façon de réutiliser les déchets de 1er cycle, de les recycler et, ensuite, de les réintroduire dans la filière, en temps que remplaçant de l’uranium naturel.
LES AVANTAGES DU MOX
Une réduction du volume des déchets nucléaires : L’uranium appauvri étant un déchet de la production de l’uranium enrichi, il est possible de fabriquer du nouveau combustible nucléaire uniquement à partir de déchets de l’industrie nucléaire. En outre, le MOX permet également de recycler le plutonium. Ainsi, environ 80 tonnes de plutonium ont été recyclées depuis 1987.
Une économie en uranium enrichi : Le MOX permet d’utiliser de l’uranium naturel, voire de l’uranium appauvri, à la place du traditionnel uranium enrichi, ce qui représente une économie de 12% d’uranium par an (soit environ 8 000 tonnes d’uranium naturel économisé depuis 1987).
Un secteur créateur d’emplois : L’usine Melox qui le produit à Marcoule dans le Gard emploie 1.300 personnes, l’usine de retraitement de la Hague en emploi 5.000.
LES INCONVENIENTS DU MOX
Un recyclage difficile : Théoriquement le combustible MOX usagé pourrait être encore retraité. Cependant, la qualité du plutonium se dégrade pendant l’utilisation du MOX. Son retraitement est donc nettement plus problématique que celui de l’uranium. C’est pourquoi il n’est pas envisagé à ce jour de retraiter de nouveau le MOX usagé.
Une radioactivité plus importante : Le MOX est plus radioactif que les combustibles classiques. Sa fabrication, son transport à travers le monde et son utilisation dans un réacteur nucléaire nécessitent donc des précautions particulières en termes de protection des travailleurs et des populations des territoires traversés. Le refroidissement du MOX usagé prend environ 10 fois plus de temps (50 ans au lieu de 5 à 8 ans), ce qui demande des installations de refroidissement plus grandes.
En dehors des considérations liées à la physique nucléaire, le MOX est un sujet politique hautement explosif.
Récemment, il a été au cœur du psychodrame entre le parti socialiste et Europe Ecologie-Les Verts. En effet, suite à l’accord électoral, la confusion a régné lors de la « disparition-réapparition » de la fameuse phrase sur le MOX.
Pour notre part, nous soutenons la filière MOX en France :
– car elle est à la pointe de l’innovation dans le domaine du recyclage et du traitement des déchets nucléaires.
– Parce que la filière nucléaire française est une filière d’excellence.
– Parce que refuser le MOX, c’est refuser du même coup l’EPR nouvelle génération dont le MOX est le combustible.
– Parce qu’on ne peut pas tout à la fois démanteler le nucléaire en France et lutter contre le réchauffement climatique.
Compte tenu de l’actualité récente sur ce sujet que j’ai développé précédemment, votre proposition, Monsieur le Président, d’émettre un avis « réservé » sur le dossier qui nous est présenté par Monsieur le Préfet, nous va tout à fait.
Nous voterons donc pour cet avis réservé. C’est-à-dire un avis favorable avec des réserves quant aux questions de sécurité nécessaires autour de la filière MOX et de son utilisation à la centrale du Blayais.
Je vous remercie,
Xavier Loriaud