Intervention au nom du Groupe Gironde Avenir (Conseil Général de la Gironde, Budget Primitif 2015)
19 décembre 2014
Conseil Général de la Gironde, Budget Primitif 2015, Vendredi 19 décembre 2014.
Intervention au nom du Groupe Gironde Avenir.
Mes chers Collègues, Monsieur le Président,
Monsieur le Président, nous voilà ensemble une dernière fois avec vous pour débattre du budget du Conseil Général de la Gironde.
Les chiffres présentés par Jean-Marie Darmian ressemblent à s’y méprendre à ceux dont nous avons débattu il a quelques jours à l’occasion du Débat d’Orientations Budgétaires… Je ne vous livrerai donc pas une nouvelle et longue analyse … Un discours que certains ici qualifièrent jadis de discours à la « Fidel Castro »…Ce n’est plus dans l’air du temps ! Cuba s’ouvre au Monde, et moi, je limite mon propos à l’essentiel…
Pour l’analyse du budget, comme nous en avons parlé ensemble très largement le 31 octobre, je me contenterai de vous dire : « idem dito » !
Nous sommes d’accord sur les chiffres et nous partageons les inquiétudes de tous les élus locaux mais ne trouvons pas dans ce budget la réponse aux questions que tous se posent.
En effet, la baisse des dotations de l’Etat aux collectivités locales de 30% en quelques années met notre département et nos communes en grand danger ! On ne voit pas comment un frémissement de la croissance annoncé hier par l’INSEE, + 0,7% en 2015, pourra changer les choses pour nous …
Cette baisse des dotations nous oblige !
Une augmentation de la fiscalité pour compenser la baisse des dotations ne serait ni raisonnable, ni souhaitable. Ce serait d’ailleurs un parjure au « Pacte de confiance et de Responsabilité », un pied de nez aux citoyens auxquels le Président de la République a promis une pause fiscale !
Mes chers collègues, nous devons assumer seuls la baisse des dotations de l’Etat. Nous devons nous organiser ensemble pour assumer nos politiques, sans avoir de recours supplémentaire à l’impôt.
Compenser cette baisse des dotations par une diminution de l’investissement serait suicidaire… Ce serait faire supporter d’une autre manière aux Girondins, aux entreprises, à l’économie, à l’emploi, la baisse des dotations de l’Etat !
Mes chers Collègues, notre mission pour les mois et les années qui viennent, c’est de faire en sorte que l’on puisse maintenir 100 M€ d’épargne brute pour financer l’investissement en Gironde !
Compenser cette baisse par une diminution de l’aide aux communes serait injuste car ce serait reporter sur d’autres la responsabilité que le gouvernement fait peser sur nous… Or le budget des communes est impacté, plus encore que le nôtre, par la baisse des dotations de l’Etat…
Mes chers collègues, Monsieur le Président, ni les communes, ni les citoyens, ni l’économie de notre département ne peuvent assumer par ricochet les baisses de dotation de l’Etat au département de la Gironde…
C’est à nous, par le travail et la concertation, avec l’aide de l’ensemble du personnel du Conseil Général, sans lequel rien n’est possible, de trouver des solutions pour trouver, en interne, les économies demandées par le gouvernement…
Le challenge est énorme. Il doit tous nous mobiliser. La Nation cherche 100 milliards d’économies et nous, 85 millions d’économies sur 3 ans !
Ce budget, Monsieur le Président, nous voterons contre ! Parce qu’il porte en lui les stigmates des mensonges de la campagne présidentielle, les promesses qui n’engagent que ceux qui les écoutent, les problèmes qu’on entend résoudre sans leur apporter de solution…
Les collectivités locales, par les choix et les non-choix d’un Président aujourd’hui aux abois sont dans une situation inédite.
Ce budget, nous voterons contre –sauf Pierre Yerlès, logiquement, car il est Président de Commission.
Ce budget, nous voterons contre… mais nous sommes conscients que c’est peut être à nous, si les citoyens le décidaient, qu’il reviendra de l’exécuter…
Mais le sujet du jour, Monsieur le Président, ce n’est pas le vote du budget, c’est vous !
Nous voilà tous une dernière fois devant vous dans cette arène pour ce moment essentiel de notre vie commune, qu’est le vote du budget de notre collectivité.
Nous avons vécu votre dernière intervention hier matin, sur le budget, Monsieur le Président, avec une certaine émotion… Disons une émotion certaine.
Plus qu’une page qui se tourne pour notre collectivité, c’est un livre, que dis-je, une bibliothèque entière que l’on ferme !
Pour certains élus, on parle de « passage dans la vie politique . Vous concernant, « passage » n’est pas le mot adapté, tant vous avez incarné le département de la Gironde, pendant 36 années.
Depuis que vous avez annoncé votre choix il y a quelques jours, chacun de nous se demande : « Si la presse me demande ce que je pense de Philippe Madrelle, que vais-je répondre ? »
« Est-il possible de dire du bien d’un homme avec lequel on a combattu sur le terrain des idées ? »
Et bien la réponse est « oui » ! Pourquoi ne pas le dire ?
- Que serait la démocratie, s’il n’y avait qu’une pensée ?
- Que serait le débat public, si nous pensions tous la même chose ?
- A quoi ressemblerait notre hémicycle s’il n’y avait ici, sur ces bancs, qu’un parti politique représenté ?
- Que serions-nous, tous, sans les élus communistes, sans les élus de Gironde Avenir, sans les frondeurs, sans les empêcheurs de tourner en rond, sans les rebelles d’ici et d’ailleurs ?
- La démocratie naît de la différence. Le débat naît de l’affrontement des idées.
- Que serait la majorité sans l’opposition ? Que serait l’opposition sans la majorité ?
- Chacun existe grâce à son contraire ! Chacun se construit grâce à l’autre…
- La contradiction est tellement importante dans un raisonnement…
- Comment faire la synthèse sans la thèse et l’antithèse ?
Notre pays, écrin de la dialectique ne doit pas tomber dans la pensée unique… Ce serait terrible et nous verrions la nuit tomber sur nos idées et toutes les « lumières » s’éteindre…
- La critique est facile et l’art est difficile- dit-on- Mais demandons-nous, chers collègues, ce que serait l’art sans la critique …
- Le commentaire est facile et l’action est difficile –dit-on- … Mais que serait l’action si elle n’était pas commentée ?
- La majorité gouverne et l’opposition conteste –dit-on-… Mais à quoi ressemblerait un gouvernement sans la contestation ?
Alors, Monsieur le Président, merci de nous avoir permis d’exister ! Merci d’avoir élevé le débat et ce faisant, de nous avoir permis d’élever le niveau de nos propres réflexions…
- Vous qui aimez le sport et ses valeurs, vous le savez mieux que nous tous, c’est en jouant contre des équipes plus fortes, contre un joueur mieux classé, que l’on parfait sa technique, son « sens du jeu », que l’on performe …
Alors, Monsieur le Président, merci d’avoir permis à votre opposition d’acquérir, grâce à vous, des qualités de jeu qui lui serviront demain.
Vos qualités propres, les qualités de vos équipes, vos défauts aussi, ont été pour nous, votre opposition, un challenge perpétuel, une école de chaque jour, un exemple à suivre ou pas, mais un exemple qui nous a permis de nous construire.
C’est un peu la traduction politique des courants induits, mis en évidence par Laplace ou Foucault, à moins que ce ne soit Lenz… Jacques Maugein nous le dira !
Lorsque vous posez deux fils de cuivre l’un à coté de l’autre, sans qu’ils ne se touchent … eh bien des physiciens ont démontré qu’en faisant circuler du courant électrique dans l’un des fils, on créait un courant électrique dans l’autre … sans contact, simplement parce que se crée un champ magnétique entre les deux… De cette découverte on a développé le principe de « l’induction magnétique », des courants de « Foucault »…
Monsieur le Président, sans le savoir, vous avez participé à la formation de votre opposition par « induction »…
Ce principe physique est un principe cher à la démocratie.
Chemin faisant, les majorités forment leur opposition à l’exercice du pouvoir par « induction »… cela permet ce qu’on appelle « la respiration démocratique » qui a permis en France, par le jeu des alternances, de construire le pays, tel qu’il est, de parfaire la décentralisation voulue par François Mitterrand et Gaston Defferre, comme vous l’avez dit Monsieur le Président, dans votre discours d’ouverture de cette séance.
L’alternance partout, sauf en Gironde…
En effet, force est de constater qu’en Gironde, vous n’avez pas laissé beaucoup de place à l’alternance, Monsieur le Président, tant le destin de la Gironde et le votre s’était confondus…
– 3 ans d’alternance, quand vous avez laissé la place à Jacques Valade de 1985 à 1988. – 1 an de cohabitation avec Hugues Martin, après l’élection de Dominique Vincent dans une élection cantonale partielle en 1993. Une « cohabitation départementale », comme une « parenthèse inattendue » qui fait partie désormais des faits politiques dont on parle dans les écoles d’administration et de sciences politiques…
J’ai déjeuné un jour avec votre collègue Vincent Eblé, Président Socialiste du Conseil Général de Seine-et-Marne. C’était dans un mariage familial et la parole était assez libre. Il m’a raconté être venu pendre conseil auprès de vous, un jour, afin de préparer l’éventuelle cohabitation qu’il craignait dans son propre département…
Monsieur le Président, vous avez tenu la maison pendant de longues, de très longues années… Vos opposants se sont usés… Et quelques uns de vos dauphins présumés, après s’être récité chaque matin ce poème : « Anne ma sœur, Anne ne vois-tu rien venir »… ont fini, ne voyant décidément rien venir, par aller voir ailleurs !
Ce qui a valu à Gilles Savary de dire au sujet de votre succession, avec ce trait d’humour qu’on lui connaît : « Les dauphins finissent un jour par s’échouer sur une plage » …
Comme le disent avec bon sens, les forestiers : « Rien ne pousse à l’ombre des grands arbres »…
Mais force est de constater que vous avez élevé dans votre pépinière quelques baliveaux qui sont allés pousser ailleurs : Alain Rousset, Gilles Savary, Vincent Feltesse, Philippe Plisson, Martine Faure… et chacun des Conseillers Généraux de la majorité que vous avez aidé à siéger dans cet hémicycle…
Les « bébés Madrelle » sont nombreux depuis 36 ans : ceux qui vous doivent un coup de pouce, un regard, une courte-échelle, un coup de main … et pour certain : un coup de poing !
Chacun sait combien vous avez aimé enfiler les gants et monter sur le ring !
Ils sont nombreux, tous ceux que vous avez aidé à être élu, et très nombreux aussi, tous ceux que vous avez aidé à être battus !
Alors, Monsieur le Président, comme cadeau de départ, puisque c’est ce que vous aimez le plus, le groupe Gironde Avenir vous dit : « Rendez-vous en mars pour un nouveau match ! »
Vous ne serez pas sur le ring, mais nous avons bien noté hier, dans votre discours, que vous aviez gardé les gants pour participer au combat !
Je vous remercie.
Seul le prononcé fait foi.