Sud Ouest : « Un budget marqué à gauche »
Le budget 2012 joue sur la relance par l’investissement sans rogner sur la solidarité mais avec une fiscalité en hausse.
Yves Lecaudey, le précédent vice-président aux finances du Conseil général, avait coutume de dire : « l’économie n’est ni de droite, ni de gauche », façon pour lui de signifier qu’elle obéit au principe de réalité. Et pourtant, à entendre son successeur Jean-Marie Darmian, qui présentait hier son premier budget pour l’année 2012, l’impression subsistait que l’économie était passée à gauche. Dans un contexte de crise, avec des dépenses sociales en hausse de 5 %, des recettes qui se réduisent (200 millions en moins de dotation d’État) et une ressource précieuse mais aléatoire (les droits de mutation sur le foncier bâti), le nouveau grand argentier a opté pour la « relance keynésienne », comme l’a souligné son collègue Gilles Savary.
Entendez par là que le Conseil général a donné la priorité à l’investissement (+5 %) « pour ne pas pénaliser les entreprises et l’emploi girondins » sans cependant rogner sur les dépenses de solidarité (RSA, personnes âgées, handicapés), forcément affectées par la hausse du chômage et le vieillissement de la population.
L’exercice était donc compliqué. À en juger par les applaudissements qui ont suivi l’intervention de Jean-Marie Darmian, aussi pédagogique et aussi mordant que son prédécesseur, l’examen a été réussi avec mention. Et à entendre quelques lapsus dans ses derniers propos, on sentait que l’effort intellectuel avait éprouvé l’orateur. Mais on ne gère pas un capital de 1,547 milliards d’euros comme on se promène sur une piste cyclable.
Un prix fiscal
Reste que cette « stratégie budgétaire » (expression de l’intéressé) a un prix. Il est fiscal. Darmian s’en est expliqué ainsi : « la fiscalité est un acte politique, la taxe une lâcheté ». Malgré la régulation des dépenses de fonctionnement et un recours modéré à l’emprunt, l’impôt départemental augmentera de 3,5 %, « la plus forte hausse depuis 2006 » releva le leader de l’opposition Yves d’Amécourt. Il la juge injustifiée pour quatre raisons : un niveau d’endettement jugé par lui « acceptable », des droits de mutation considérés comme « sous-estimés » (approuvé en cela par le communiste Jean-Jacques Paris, qui les évalue à 208 millions au lieu de 197 millions), l’existence de « poires pour la soif », enfin des investissements jugés insuffisants.
Et de réclamer de plus grands efforts dans la baisse des dépenses de fonctionnement et plus de transparence dans les actions du Conseil général.
Force est de constater que ces critiques apparaissaient plutôt mesurées, comme si la droite admettait la difficulté de l’exercice imposé. Du reste, sept conseillers seulement sur les treize de Gironde Avenir étaient présents pour voter contre ce budget, les communistes ayant suivi les socialistes (41 votes pour). Un signe que n’a pas manqué de relever Philippe Madrelle. La droite girondine avait été plus à son aise la veille en mettant le doigt sur un article mal fichu fixant la limite d’âge des personnes privées accueillant les vieillards ou les handicapés à leur domicile au-delà de 65 ans. C’était certes dans le but de ne pas léser les intéressés mais ce seuil apparaissait pour le moins curieux dans le débat actuel sur les retraites. L’opposition a obligé la majorité à rectifier le tir : ce fut sa plus grande réussite en deux jours.
Source : Sud Ouest du 21/12/11
Par Hervé Mathurin